La rationalisation des modes de communication

Le SNDP – CFDT vous informe sur l’actualité du secteur pénitentiaire

Nos modes de communication en disent long sur l’organisation de notre travail et du système
dans lequel il s’inscrit. Le développement des nouveaux outils de communication, sans cesse
plus performants (encore faut-il en être doté…) et plus rapides, a fortement impacté nos services,
nos organisations et même nos vies.

Les dysfonctionnements de la communication électronique.

Le développement irréfréné des communications électroniques est à l’origine de
dysfonctionnements majeurs et d’un véritable mal-être des personnels.

Le nombre de mails reçus quotidiennement tout d’abord atteint dans de nombreux services un point de non retour :
quand un cadre reçoit par jour plus de courriers électroniques qu’il ne peut en traiter, il n’est
non seulement plus en capacité d’organiser sa journée de travail de façon rationnelle mais
développe surtout un sentiment d’impuissance totale. Ajoutons que parmi le flot de courriels
ainsi reçus, se mêlent commandes urgentes et extrêmement importantes et sujets dont il n’a que
faire. L’aspect pratique des listes de diffusion connait ici clairement des limites que nous avons
désormais atteintes. Certains directeurs ont donné, au sein de leurs services, des directives en
matière de bon usage de la messagerie électronique, mais ces dispositifs ont leurs limites et ne
sont pas particulièrement soutenues par la hiérarchie.

Des boites mails qui explosent !

Autre dérive : le courrier électronique tend à devenir le seul mode de communication.
D’une part, il a largement surpassé l’appel téléphonique ou le temps de parole en face à
face,
dans une optique de gain de temps supposé. Il est aujourd’hui monnaie courante de
recevoir une information importante et urgente par ce biais, sans qu’aucun appel ne viennent
par ailleurs nous alerter. Sans doute imagine-t-on qu’un cadre reste assis devant son ordinateur
toute la journée ? Sans doute veut-on encore croire qu’il a la capacité de tous les lire (sans parler
de les traiter…) ? A titre d’exemple, les notes du DAP et des DISP sont aujourd’hui envoyées par
courrier électronique. A certains endroits, elles sont envoyées au chef de service et à son adjoint.
A quoi sert donc un secrétariat de direction ? « Diffuser le courrier » aux équipes fait-il vraiment
partie des fonctions d’un chef de service, qu’il soit chef d’établissement ou DFSPIP ? Est-il en
capacité par ailleurs, une fois qu’il a diffusé la note, de s’assurer à chaque fois que la commande
est traitée efficacement, et dans les délais ? En a-t-il le temps ? S’est-on interrogé sur le
nécessaire recrutement de nouveaux agents, dans chaque service déconcentré, pour effectuer un
réel contrôle de gestion en la matière ? Il en est de même des appels à projets, des réunions de
travail, etc. Avec pour conséquence, des ratés en termes de diffusion, ou des diffusions très
tardives qui empêchent la réalisation du travail en temps voulu.

Nous sommes tous devenus les otages de nos boites électroniques, vivant pour certains dansl’angoisse de passer à côté d’une information déterminante et de finir noyé sous le flot.

Réunion et outils informatique, un désastre dans les échanges !

Nos temps de réunion sont aujourd’hui complètement parasités par ce phénomène : qui n’a pas fait
l’expérience de ces temps de travail où personne ne participe activement, chacun étant retranché
derrière son ordinateur en train de taper frénétiquement sur son clavier pour répondre à ses
mails ?

Faut-il alors refuser que les participants à une réunion y viennent avec leur ordinateur portable ?

D’autre part, le courrier électronique a supplanté tout autre mode de
transmission d’information officielle :

les consignes pérennes sont régulièrement transmises par courrier plutôt que par note de service. Quelle ne fut pas la surprise des directeurs en SPIP de recevoir, après le féminicide de Mérignac, des consignes du ministère en matière de prise en charge des violences conjugales par mail.

Quelle traçabilité/durabilité pour ce type de consignes ?

Quel travail autour de la qualité et de la clarté de ladite consigne ?

Pourquoi dans certains établissements, des décisions à notifier sont-elles envoyées aux personnels de direction et non aux greffes ou aux BGD (décision DPS, décisions d’affectation en QER/QPR, etc.) alors même
que la notification dans un délai contraint de certaines d’entre elles présente un enjeu juridique
majeur ?

Tous vers une stratégie du bénéfice de la communication digitale.

De manière plus globale, nous considérons qu’il convient de faire une utilisation
stratégique des technologies actuelles de communication, à notre bénéfice et non contre
nous.

Elles doivent permettre un gain de temps, en rendant par exemple possible certains temps
de réunion en visioconférence afin d’économiser des déplacements. Elles doivent également
permettre de favoriser un télétravail encadré. Elles ne doivent plus faire de nous des machines
déréglées, nous assujettir à un traitement en temps réel, sans considération des limites entre
temps de travail et vie personnelle. Nous faisons en effet le constat que la plupart des cadres,
désormais dotés d’un ordinateur portable, se trouvent plus ou moins contraints – l’auto-
contrainte étant sans doute le phénomène le plus difficile à appréhender – de travailler à des
heures déraisonnables. L’épuisement et la contagion du professionnel sur la sphère personnelle
ne permettent en outre pas un travail de qualité.

Comment rester aussi concentré et efficace à 22h qu’à 9h le matin ?

Ces organisations nuisent également à nos services, en ce qu’elles leur donnent le mauvais exemple et que la qualité de réponse apportée est amoindrie.
Les services doivent en outre être dotés d’outils de travail efficaces : une attention renforcée
doit être portée aux logiciels dont nous disposons, certains d’entre eux étant déficients. Aucune
réforme ne saurait être déployée sans que les mises à jour informatiques nécessaires ne soit
opérées. L’intranet est par ailleurs insuffisamment utilisé. Un espace documentaire regroupant
la réglementation applicable doit être recréé. Il est en effet invraisemblable que depuis le
déménagement de la DAP de la rue du Renard à la rue de la Gare, l’intranet ne permette plus
d’accéder à un fichier recensant l’ensemble des notes et circulaires en vigueur. De ce point de
vue, les intranets de la DACG et le la DSJ pourraient inspirer les équipes qui travaillent sur
cette question à la DAP. Dans le même ordre d’idées, les pages Intranet des services doivent
être nourries par les services eux-mêmes et non plus seulement par des services de
communication afin qu’y figurent des informations de fond, accessible aux agents. Cela suppose
en contrepartie de permettre aux services concernés d’y consacrer un temps de travail non
négligeable. Prenons ici l’exemple de la page intranet de la mission de lutte contre la
radicalisation violente, en construction depuis des mois (pour ne pas dire des années) alors
même qu’elle pourrait constituer une ressource précieuse pour les services déconcentrés.

Enfin, nous constatons un véritable emballement dans les attentes qui pèsent sur les

structures en matière de remontée d’information

Il faut aujourd’hui tout « remonter », y compris des éléments qu’aucun texte ne nous impose de transmettre, sous peine de remontrances visant à souligner notre négligence. Il faut en outre « remonter » de manière immédiate les éléments, notamment en matière d’incident, au risque de ne pouvoir traiter l’incident lui-même de manière satisfaisante. Cette temporalité confine à la déraison et nuit clairement à la bonne
gestion des incidents dans les structures. Il faut en outre, depuis quelques mois, tout ressaisir
dans l’application PRINCE quelques heures plus tard. La plus-value de ce nouveau dispositif
n’est toujours pas redescendue vers les personnes qui l’alimentent, de sorte qu’ils développent
désormais le sentiment d’effectuer – une nouvelle fois – plus de travail pour rien. Parmi les
conséquences observées, la masse des informations transitant par ce biais étant devenue trop
importante, on constate que certaines structures, notamment au niveau interrégional, ont
réorganisé leur système de permanence incident afin que la charge de travail impliquée ne pèse
plus que sur un petit nombre d’agents. Tiennent donc désormais ces permanences « incidents »
des agents qui n’ont aucune connaissance de la thématique qui leur est soumise lorsque les
cadres des établissements ou les SPIP les appellent, dans la mesure où leurs fonctions
quotidiennes sont toute autres.

Nous demandons à ce que ce système inepte visant à satisfaire la soif du ministère et de l’administration centrale de tout savoir en temps réel cesse et que chacun retrouve sa place et les missions qui lui incombent.

Le SNDP demande la mise en œuvre d’une réflexion autour de nos modes de communications visant :

  • à rationaliser notre utilisation des courriers électroniques afin d’en limiter la quantitéet de les utiliser à bon escient. Un travail sur la rationalisation de nos modes de communication et l’utilisation de la messagerie électronique nous semble déterminant si l’on souhaite restaurer la qualité et l’efficacité dans nos pratiques et une forme de mieux-être chez les personnels, en particulier chez les cadres.
  • à mettre réellement en œuvre le droit à la déconnexion, même pour les cadres dirigeants, droit indispensable pour préserver à la fois notre efficacité au travail et notre vie privée.
  • à mettre réellement en œuvre le droit à la déconnexion, même pour les cadres dirigeants, droit indispensable pour préserver à la fois notre efficacité au travail et notre vie privée.
  • le développement d’outils de communications adaptés et performants, qu’il s’agisse des applications informatiques dont nous disposons ou encore du développement d’une information de qualité sur l’Intranet Justice
  • un retour à un système de remontée d’information et d’incident clair et rationnel, déconnecté des passions politico-médiatiques.

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