La catégorie B pour les surveillants pénitentiaires : il faut assumer !

Le SNDP – CFDT vous informe sur l’actualité du secteur pénitentiaire

Une annonce surprise !

C’est presque par surprise que le garde des Sceaux a annoncé le 21 février dernier lors de la cérémonie d’installation de la 215ème promotion de surveillants pénitentiaires à l’école nationale d’administration pénitentiaire une grande réforme statutaire et indemnitaire de la filière de surveillance.

Le point majeur selon nous est l’accession du corps des officiers à la catégorie A et celle de tous les agents du corps d’encadrement et d’application (surveillants, brigadiers, premiers surveillants et majors) à la catégorie B.

Le passage en catégorie A des officiers était un souhait constant du SNDP. Notre organisation avait critiqué la réforme antérieure « UFAP-Urvoas », qui a consisté à casser le corps des officiers entre ceux partant vers la catégorie A (les Chefs de Services Pénitentiaires) et ceux restant en catégorie B malgré le niveau de diplôme très élevé des candidat-e-s issu-e-s du concours externe depuis la fin des années 1990. Nous étions favorables à ce que les premiers surveillants et majors passent eux en catégorie B, au motif qu’ils occupent déjà des postes de plein encadrement (en établissement pénitentiaire mais pas seulement : rôle aux PREJ, aux ERIS, etc.) et qu’ils garantissent la continuité du service des établissements de jour comme de nuit, tâche particulièrement difficile aujourd’hui (pénurie de surveillants, multiplication des incidents, complexification des procédures d’écrou…).

Une administration dépourvue de cat C !

Le passage en catégorie B des surveillants non gradés (incluant ici les brigadiers) était pour nous bien moins évident. Voilà donc une administration de l’Etat désormais dépourvue de catégorie C parmi ses corps propres (à l’exception des adjoints techniques), et dont beaucoup des nouveaux accédants à la catégorie B n’ont pas a priori le profil de cadres (ce qui n’a rien de péjoratif, et notre administration est sans doute celle qui offre le plus de diversités de parcours et d’opportunités de promotion hiérarchique). Par ailleurs, éliminer parmi les candidats – déjà peu nombreux ! – ceux ayant un diplôme inférieur au baccalauréat relève d’une approche discutable car les qualités et aptitudes professionnelles attendues d’un bon surveillant n’ont en réalité pas grand-chose à voir avec les disciplines apprises au lycée. Nous connaissons tous, dans nos établissements et services, d’excellents surveillants qui ne sont pas titulaires du baccalauréat.

En tout état de cause, nous prenons acte de cette décision avant tout politique, avec l’ambition de mieux recruter, en quantité comme en qualité, et mieux fidéliser. De ce point de vue, la stratégie de l’administration pénitentiaire, poussée par certains syndicats de surveillants, est non seulement louable mais salutaire compte-tenu des effectifs insuffisants de surveillants et des difficultés de recrutement.

Une stratégie nécessitant des mesures concrètes

Cette stratégie ne pourra toutefois être efficace qu’accompagnée d’un certain nombre de mesures :

  • Le métier doit rapidement et profondément évoluer, comme nous le demandons depuis longtemps (cf. notre communiqué du 16 février 2017, Halte à la multiplication des missions sans préparation et à la dévalorisation des surveillants de détention). La mise en œuvre de la doctrine du « surveillant acteur » est sans doute un moyen d’y parvenir, mais elle ne doit pas être le seul. Notamment, le travail ne doit plus être solitaire. Le surveillant ne doit plus être unique responsable à l’étage, d’autres systèmes permettant plus de solidarité et de sécurité pourraient désormais être mis en œuvre. Ce sont des mesures concrètes, ne concernant pas une poignée d’agents mais la totalité d’entre eux et en particulier ceux qui travaillent sur les coursives, qui sont attendues.
  • Les rythmes de travail doivent être revus afin de respecter les besoins physiologiques des surveillants et leur permettre un meilleur équilibre entre vie personnelle et professionnelle, et donc s’ils le souhaitent une meilleure participation à la vie de la Cité.
  • L’accompagnement social doit être encore développé, par des dispositifs plus adaptés d’aide au logement, d’accès à des crèches aux horaires décalés, de participation accrue de l’administration aux frais de transport ou d’incitation financière au covoiturage, etc.
  • Des agents contractuels doivent très rapidement être recrutés et formés. A ce titre, le ministre a précisé que ceux-ci « pourront être recrutés, sur des postes de surveillants restés vacants à l’issue des concours, pour seconder les agents titulaires et leur permettre de découvrir les métiers pénitentiaires ». Il est difficile pour le SNDP-CFDT de se féliciter de la possibilité nouvelle de recruter des surveillants contractuels car les fonctions particulièrement difficiles et sensibles de l’administration pénitentiaire justifient qu’elles soient assurées par des agents de l’Etat, soumis au statut mais aussi protégé par lui, et échappant ainsi à la précarité de l’emploi sous contrat. Il s’agit en outre d’un aveu d’échec collectif, l’administration centrale et ses cadres sur le terrain ne parvenant manifestement pas à rendre le métier suffisamment attractif malgré les revalorisations salariales. Les médias et certains syndicats de surveillants n’ont guère contribué non plus à cette attractivité, par une présentation catastrophiste de la vie carcérale et des mouvements sociaux violents. Pour autant, ce recrutement de surveillants contractuels était la seule solution viable à court terme tant la différence est élevée entre le nombre d’agents disponibles et le nombre d’agents nécessaires. D’ores et déjà, le SNDP alerte sur la difficulté actuelle, pour les directeurs pénitentiaires, de couvrir tous les postes de surveillants (en établissement bien sûr, mais aussi dans les SPIP avec les surveillants DDSE, dans les PREJ, dans les DISP, etc.). La situation est sans commune mesure avec celle des années précédentes et les vacances de postes déjà importantes se cumulent désormais, dans des cas de plus en plus nombreux, à un absentéisme très élevé. Aussi, maintenant que le principe est acté, le recrutement
    et la formation de contractuels doivent-ils être une priorité pour l’administration afin de pouvoir très rapidement se redonner les moyens d’assurer un service public pénitentiaire de qualité- a minima moins dégradé.
  • La mise en œuvre efficiente de ces mesures repose bien entendu sur la qualité du dialogue social entre la DAP et les organisations syndicales, mais également sur la détermination de l’ensemble des cadres, en administration centrale évidemment s’agissant d’une stratégie nationale, mais aussi en DISP ainsi qu’au niveau local. Le SNDP souhaite chacun prenne sa part dans la conception et la mise en œuvre de ces mesures et sera vigilant quant à la nécessaire concertation entre les différents maillons de la chaîne hiérarchique sur ce sujet stratégique.

Une régulation carcérale impérative

Enfin, au-delà de ces mesures liées à la sphère des Ressources Humaines, il doit être une fois de plus être rappelé que nous n’attirerons et fidéliserons les surveillants que si nous parvenons à réduire, en tout cas à réguler, la surpopulation carcérale, un chantier qui reste inabouti au sein de notre ministère. C’est donc à tout cela que doit s’atteler dès maintenant le ministre de la Justice, avec la volonté politique indispensable et les moyens financiers très élevés que ces annonces induisent.

 

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